jeudi 23 octobre 2014

Folle diagonale!

Prédiagonale: Vendredi 17 octobre, alors que je pose pour la 1ère fois les pieds sur le sol réunionnais (avec certes 2h de retard), je sais que je ne peux plus reculer: je prendrai dans 6 jours le départ de la diagonale des fous qui est mon Objectif (avec un grand "O") de la saison 2014. Quelques jours plus tôt j'apprenais que suite à l'effondrement du taïbit, la parcours initial (à voir ici) serait modifié, et de ce fait rallongé, pour donner cette douce folie: environ 175km et 10 000 de D+. Je me dis qu'il faut être fou pour signer pour ça et encore plus timbré pour le finir.


Une petite rando au Maido est l'occasion pour moi de faire la douloureuse expérience du climat tropical. Verdict: humidité + chaleur = pieds gonflés = ampoules en moins d'1h de marche (j'ai toujours été bonne en maths). Je portais pourtant les chaussures que je pensais initialement mettre pour le Grand Raid... Par chance Cyril, qui me rejoint le matin du départ, pourra m'apporter des chaussures moins rigides (en l'occurrence des NB Leadville). Il me reste à croiser les doigts (de pieds) pour que ces chaussures, que je ne peux tester, conviennent...

Bizarrement je suis beaucoup moins anxieuse pour le GRR que pour l'UTMB l'an dernier. Je sais que ce sera plus dur plus long mais je sais aussi que je peux le faire. J'ai fait une bonne saison, normalement je suis prête. Et puis cette année (une fois n'est pas coutume), je bénéficierai de l'assistance de toute ma famille: Cyril bien sûr, le plus expérimenté d'entre tous; mon frère, ma belle-soeur et ma petite nièce, qui ont déjà oeuvré sur le GRP; et les petits nouveaux, mes parents et mon grand cousin Azzedine. Avec ce team d'assistants aux petits soins, je ne peux qu'être finisher!

Saint Pierre, départ: Arrivée sur place avant 21h (pour un départ à 22h30), je fais l'expérience d'un grand capharnaüm: des coureurs et des barrières partout, et personne, même les bénévoles, ne semble vraiment savoir où aller pour rejoindre le départ. Je trouve finalement la queue pour accéder au contrôle des sacs et échappe à celle pour les sacs de délestage. D'autres feront jusqu'à 1h de queue; pas les meilleures dispositions pour le départ d'un 175km.

Le peloton jaune fluo dans l'attente du départ (c) IPR.


Je rejoins l'espace des heureux bénéficiaires d'un dossard élite. Je ne connais pas grand monde et me sens toute petite au milieu de ces coureurs que je vois d'habitude dans les magazines. Sur la ligne de départ, la pression monte, en partie grâce au speaker qui fait monter l'ambiance. 5-4-3-2-1-0 c'est parti!

Top départ! (c) IPR

175km nous attendent, c'est long, et pourtant ça part vite (pour moi du moins). Les 8 premiers km sont du bitume presque plats où les routards peuvent envoyer. La vitesse n'est pas mon fort, j'essaie de ne pas me laisser entrainer en partant en sur-régime mais en même temps je sais bien qu'il ne faut pas s'endormir au départ pour éviter les bouchons aux premiers sentiers. L'ambiance sur ces premiers km est juste incroyable: une file interrompue de spectateurs qui hurlent! J'en avais entendu parler mais le vivre c'est encore autre chose! Je me fais doubler par de nombreux coureurs sur ces 1ers km. Je me dis que c'est normal, surtout ne pas paniquer, rester dans ma bulle et garder mon rythme. Aude Diet du TTT me rejoint, on échange quelques mots ("t'as vu cette ambiance c'est fooooooou") puis elle prend la poudre d'escampette. Il est clair que nous n'avons pas la même vitesse (heureusement pour elle). Je ne la connais pas bien et n'ose pas lui dire mais j'espère juste qu'elle ne part pas trop vite, la route est encore longue, très longue.

Domaine Vidot, km14, 1h32, 270ème scratch: 1er ravito, je ne m'arrête pas. Pour l'instant je ne prends pas beaucoup de plaisir, nous avons eu presque que de la route (euh je croyais que c'était un trail?) et le peloton est encore très dense, j'attends avec impatience que cela s'étire. Voilà qu'enfin les premiers sentiers arrivent. Et avec eux les premiers bouchons. Force est de constater que des coureurs qui étaient bien plus à l'aise que moi sur le bitume sont en difficultés dès qu'on en sort et que la pente s'élève. Me voilà bloquée (comme bien d'autres) derrière des coureurs qui n'avancent plus. J'enrage un peu mais je me rassure en me disant que c'est peut-être un mal pour un bien: l'occasion de reprendre son souffle et de faire redescendre le coeur après ce départ rapide (toute proportion gardée).

Forêt Mont Vert, km24, 3h17, 169ème scratch: c'est ici que je dois avoir mon 1er point d'assistance par Azzedine et Cyril. Pourtant j'arrive au ravito et aucune trace de mes compères. Je regarde l'heure: c'est vrai que j'ai plus d'1h d'avance sur mon planning (de 35h)... Il faut croire que le départ était bien plus roulant que ce à quoi je m'attendais! Pas de panique, je me sers au ravito de l'organisation: mélange eau-coca pour remplacer la boisson énergétique absente au ravito, quelques bouts de sandwich pain de mie-jambon (pas terrible) et c'est reparti. 3km de bitume puis on rejoint enfin un sentier qui ressemble à du trail. Je vois que mes jambes sont bonnes. C'est de bonne augure mais surtout ne pas s'emballer! D'autant plus que la brume arrive, avec elle le froid, la pluie et le vent. Je mets ma veste. J'ai déjà fait l'erreur de ne pas assez me couvrir à la TDS 2013 et j'ai retenu la leçon. Je double Julia Bottger qui claque des dents en courant. Cela me rappelle Agnès et moi sur la TDS, rôles inversés.

Piton Textor, km40, 5h42, 95ème scratch: voilà le 1er sommet du jour (2150m). Je ne m'arrête pas au ravito et entame la descente à bonne vitesse. Trop peut-être car les rochers sont mouillés et sur un mauvais appui je glisse et tombe de tout mon poids le genou gauche en avant sur un rocher pointu. Un cri m'échappe, j'ai très mal. Ah non p##### je ne peux pas me blesser maintenant alors que je n'ai encore rien fait! Je continue en boitant, surtout repartir, ne pas se refroidir. Le genou me lance mais je me répète que ce n'est sûrement qu'un bleu et qu'on n'arrête pas pour un bleu! Non mais! Je retente de trottiner, voilà j'y arrive, c'est pas encore la belle foulée (l'est-ce jamais?) mais j'avance. Au fur et à mesure je m'habitue à la douleur et commence à l'oublier.

Mare à Boue, km50, 6h57, 79ème scratch: il commence à pleuvoir fort et surtout le vent souffle. J'ai froid. Euh on n'était pas censé être sous les tropiques? Je ne vois rien avec mes lunettes et c'est guère mieux sans. J'avance au radar mais heureusement, pas de difficulté, on est (encore) sur une partie goudronnée. 3km de bitume donc, puis voilà le ravito. Cette fois Azzedine est là, sous la pluie, à m'attendre. Il me dit que Cyril est plus loin; j'apprendrai plus tard qu'en fait, glacés par la pluie, ils se relayaient depuis 45' pour m'attendre, l'un au ravito, l'autre allant courir pour se réchauffer! Désolée les gars de vous avoir fait ça... Pour la petite histoire, trempés jusqu'aux os, ils devront ensuite aller se racheter des vêtements au décath le plus proche! Ravito express, changement de lunettes, le tout partiellement sous la pluie (les tentes de ravito sont interdites à l'assistance). J'ai les dents qui claquent et repars en croisant les doigts (bleus) pour que les conditions s'améliorent d'ici Cilaos, prochain point d'assistance où je retrouverai mes parents. J'atteins le coteau kerveguen, 2ème sommet du jour (2206m), avant de redescendre en direction de Cilaos. Dans la descente je rattrape "Stu" un anglais globe-traileur qui semble avoir roulé son camelback sur les trails du monde entier. On parle de trail (en anglais), ça fait du bien de parler après 7h d'abstinence. On a retrouvé le soleil et par la même occasion le sourire.

Avec Stu à Cilaos (photo: Francis Blanchet)

Cilaos, km65, 9h59, 63ème scratch: Mes parents, Lydie, Mirella et Menza m'attendent pour l'assistance. Mon père manque de ne pas me reconnaitre et ma mère sautille de joie en me voyant "ohlala ma fille". Tout ce qu'il y a de plus normal. Sauf que ça me fait tout drôle de les voir là, c'est la 1ère fois qu'ils viennent me voir sur un trail. Et je ne leur ai pas donné le point d'assistance le plus facile: la bagatelle de 2h de route, tout ça pour me voir 2' comme se moquera ma mère plus tard ("ben oui mman figure toi que je fais une compet là"...). Ce qui m'attend ensuite, après de nouveau 4km de bitume, est une des grosses difficultés de la journée: la montée au refuge de la caverne Dufour, un peu plus de 1300m D+. La montée est raide et longue. Le genou sur lequel je suis tombée quelques heures plus tôt recommence à me faire souffrir. Je redoute un moment la tendinite mais je finis par me convaincre que ce n'est qu'un choc. Passé le sommet (2480m), j'entame la longue descente (1800m D-) vers le gite de Belouve. J'ai moins mal en descente et (erreur peut-être) je commence à envoyer. Je double plusieurs coureurs dont Manu Lang, qui m'emboite le pas. On commence à discuter, c'est un raideur-orienteur très expérimenté. Il était bien parti sur le grand raid mais a quelque peu explosé dans la montée vers la caverne Dufour. On parle un peu, de trail, de raid et de nos vies. Manu semble content d'avoir quelqu'un pour lui donner du rythme dans la descente et j'apprécie moi-même sa compagnie. Cette descente est technique et usante: d'abord des cailloux mouillés où les appuis tiennent mal, puis une flopée de grosses marches, enfin des racines et troncs d'arbres à enjamber dans la forêt de Bélouve. On aura tout eu!

A l'arrivée à Hell Bourg (photo: Jenny Stephenson)

Hell Bourg, km87, 14h31, 48ème scratch: je suis contente de retrouver mes assistants pour une pause salutaire. Mon équipe est impressionnante: Adrien mon frère, Jenny ma belle-soeur et Sophie ma nièce préférée (certes la seule), arrivés tout fraichement de métropole, ont rejoint Cyril et Azzedine. Cette petite pause est d'autant plus appréciable que la descente infernale m'a cassé les jambes. Les cuisses commencent à chauffer et le genou gauche me fait mal à chaque pas. Il reste la bagatelle de 90km, bon ben il va falloir tenir... Cyril m'annonce que ma frontale n'a pas apprécié l'humidité de Mare à Boue et que je vais devoir en prendre une autre, plus lourde et pas régulée, avec laquelle je ne cours jamais. Mince alors!

Ravitaillement express sous les yeux de ma petite nièce (photo: Jenny Stephenson)
Je repars pile au moment où Manu sort du ravito. On continue donc notre bonhomme de chemin ensemble jusque la plaine des Merles. Manu me dit qu'on a un bon rythme, pourtant je sens bien que les choses sérieuses commencent: les cuisses qui chauffent et ce foutu genou qui me tiraille.

Plaine des Merles, km101, 17h29, 46ème scratch: je retrouve pour mon plus grand plaisir mon équipe en or, sauf Cyril parti retrouver mon père pour le prochain point au Maido. Je ne reste que quelques minutes, et c'est reparti direction le col des fourches puis le cirque de Mafate, le plus sauvage d'entre tous. Je suis toujours avec Manu.


A la plaine des Merles (photo: Jenny Stephenson)
Roche Plate, km 114, 20h47, 35ème scratch: La traversée du cirque de Mafate est superbe. Nous sommes sous un grand ciel bleu, c'est sauvage et grandiose. Ah cette lumière de fin de journée sur les parois vertes du cirque! Le coucher de soleil dans Mafate restera mon plus beau souvenir. Pourtant le tracé n'est pas facile et ces bosses pour rejoindre Roche Plate bien casse-pattes. Nous avons rejoint plusieurs coureurs et sommes une petite dizaine dans un mouchoir de poche à Roche Plate, aux pieds de la montée vers le Maido. La nuit est tombée, je sors la frontale, allume la musique (comme à mon habitude chaque nuit). Je suis parée pour affronter les 1000m D+. J'adopte un rythme de tortue mais de tortue régulière et, bon an mal an, Manu et moi gagnons de l'altitude. C'est maman tortue et papa tortue à l'assaut du Maido! La montée est dure, surtout après 22h d'effort. Je m'arrête plusieurs fois mais j'en viens finalement à bout. Manu m'annonce qu'il arrête malheureusement l'aventure ici. Fatigué, il ne se sent pas de finir sans hypothéquer le reste de son séjour en famille. Ciao l'ami et merci pour ce bout de chemin ensemble!

Maido, km121, 22h56, 34ème scratch: je retrouve mon père et Cyril. Ils m'apprennent que Uxue Fraile, qui est 2ème féminine, vient juste de partir et semblait ne pas être au meilleur de sa forme. Je suis surprise car aux dernières nouvelles, à la plaine des Merles elle avait 35' d'avance et je ne pense pas avoir fait une course exceptionnelle entre temps. Quoi qu'il en soit, la route est encore longue et je décide de faire une pause "comme si de rien n'était". Je repars avec la nouvelle frontale achetée par Cyril entre temps (3ème frontale de la journée, record battu!). Et avec la ferme intention d'essayer de rattraper Uxue d'ici Sans Soucis. C'est parti mon kiki.

Au ravito du Maido avec Cyril (photo: Francis Blanchet)

La descente est longue (1800m-), je cours bien et inévitablement, je rejoins Uxue dont la foulée me semble bien difficile à ce moment là. Je la double en marmonnant des "allez allez courage".  Pas très original mais je ne sais jamais trop quoi dire dans ces cas là!

Sans Souci, km133, 25h11, 29ème scratch: je n'ai pas prévu d'assistance ici et je m'arrête à peine, juste le temps d'avaler quelques morceaux de leurs crêpes légendaires! Ce que je ne sais pas c'est que mon frère Adrien a voulu me faire la surprise de me ravitailler ici. Mais surprise Blanchet = surprise ratée: arrivé en avance, il s'est perdu en remontant la course et je passe finalement sans le voir.

La suite du parcours jusque la possession n'est pas des plus glamour. La traversée de la rivière des galets me semble interminable et peu intéressante. La montée suivante est limite une blague, sans autre but que d'ajouter des km et du D+ (qui pourtant ne manquent pas). La descente au milieu d'une forêt dense, sans chemin ou presque, est d'anthologie: je peine à trouver le chemin mal indiqué, je suis seule dans cette forêt austère et sombre, je me sens toute petite. Pour la première fois, j'ai un petit coup de panique. Je serais tellement contente que quelqu'un me rattrape, juste pas Uxue siouplé! Sur le chemin Ratineau qui suit, je retrouve mon canard boiteux Laurent Brochard. On a tous les deux du mal à courir mais sur les rares parties peu techniques: lui pour cause de genou douloureux, moi pour cause d'échauffements de la voute plantaire. Les cuisses commencent à être bien dures, sans parler de ce genou gauche douloureux depuis 20h. Autre difficulté, depuis le début de la nuit j'ai une terrible envie de dormir. Je mange régulièrement des pastilles à la menthe pour me réveiller et dois me forcer à garder les yeux ouverts. Ohlala ça va être long cette histoire! Pour ajouter de la galère à cette galère, voilà que ma nouvelle lampe me lâche subitement. Décidément, c'est pas mon jour avec les frontales! Pourtant je suis partie avec des piles neuves au Maido, 5h plus tôt, c'est bizarre cette histoire. En fait je comprendrai plus tard qu'une des trois piles a été mal enclenchée et que la lampe ne fonctionne depuis le début sur deux piles seulement, maintenant vidées! Je vois tellement mal que je décide finalement de replacer cette lampe par ma lampe de secours qui doit éclairer autant qu'un briquet...

Possession école, km152, 29h37, 29ème scratch: Entre mes douleurs plantaires et mes soucis d'éclairage, je n'ai jamais été aussi contente de retrouver un point d'assistance! Je (re-re-) change donc de frontale pour le modèle lourd que j'avais dans Mafate (ma lampe officielle ne s'étant toujours pas remise de Mare à Boue). Verdict des pieds: mouillés depuis Mare à Boue il y a plus de 20h, ils sont tout crevassés maintenant. Erreur de débutante, j'aurais du me changer avant! Somme toute je ne m'en sors finalement pas si mal puisque je n'ai aucune ampoule. Je me nok, change de chaussettes et chaussures, et repars. Mes pieds sont moins douloureux. A la sortie du ravito, un bénévole me dit "c'est pas dur c'est tout droit". C'est ainsi que je me retrouve à trottiner sur la route le long de la 4 voies. Moment bucolique... Et moment de doute également: je ne vois aucun balisage pendant 1km, suis-je sur la bonne route? Il est 4h du mat, il n'y a personne à qui demander et aucun coureur derrière moi. Subitement, est-ce une hallucination?, je vois un vendeur de samossa (oui, à 4h du mat...) sur le bord de la route qui me confirme que je ne me suis pas perdue. Ouf! Effectivement, je retrouve peu après le chemin des anglais dont j'ai entendu, à raison, le plus grand mal! Suit 1h30 de marche où je pose mes pieds comme je peux et surtout où je peux dans un capharnaüm de blocs de pierre. C'est exténuant! Merci, vraiment merci les english! Et le pire dans l'histoire c'est que, comme me l'apprend un coureur qui me dépasse, Uxue est maintenant juste derrière moi! Je pensais pourtant avoir de l'avance (effectivement 13' au chemin Ratineau) mais je comprendrai plus tard qu'elle a comblé partiellement son retard en ne s'arrêtant pas aux deux derniers ravitos.

Grande Chaloupe, km159, 31h13, 28ème scratch: Je sors enfin de ce calvaire anglais. Au ravito j'annonce à mes assistants que je ne m'arrêterai pas car Uxue est juste derrière. Cyril semble un peu inquiet que je ne mange rien (mauvais souvenirs de l'UTMB) mais je sais ce que je fais, j'ai encore de la boisson et de quoi me ravitailler. Juste le temps d'enfiler le débardeur obligatoire de l'organisation pour cette fin de course et je repars. Un peu plus loin, sur le chemin des anglais (version soft par rapport à tout à l'heure), je jardine quelques minutes à une intersection douteuse où je ne vois aucune rubalise. La montée est longue, je regarde régulièrement derrière mais ne vois pas Uxue, ni aucun autre coureur d'ailleurs. Après 350m D+, on rejoint une route (ça faisait longtemps), puis de nouveau un sentier. Là, je ne sais pas trop ce qu'il se passe, perte de concentration ou mauvais balisage (ou les deux), toujours est-il que je me perds et y laisse encore quelques minutes supplémentaires. Il faut dire que mentalement je suis exténuée, même si physiquement ça ne va pas si mal: mes yeux se ferment et je m'endors plusieurs fois en courant! Alors que je récupère le bon chemin, je vois arriver Uxue à mon niveau. On est coude à coude sur cette fin de montée. Arrivées en haut, on perd toutes les deux notre lucidité car nous voilà parties en sprint! C'est complètement ridicule puisqu'il reste presque 1h de descente mais à ce moment là nous sommes toutes les deux incapables de réfléchir! Je prends un peu l'ascendant sur Uxue au début de la descente que j'aborde comme une voiture de F1 (crevée). Mais je suis mentalement trop fatiguée, je m'endors plusieurs fois en courant et ce qui devait arriver arriva: à quelques centaines de mètres de la fin du sentier, Uxue me rattrape de nouveau. Ah non alors, elle ne va pas me doubler maintenant cette satanée basque!! ;) J'accélère alors qu'on rejoint la route et prends de nouveau de l'avance. J'entre en tête dans le stade de la Redoute, vois Cyril et Adrien à l'entrée, tout contents pour moi. Je ralentis sûrement pour leur parler et faire signe à ma famille. Je souris, suis heureuse, jusqu'à ce que j'entende mon frère me hurler "sprint Juliette sprint"! Uxue m'a de nouveau rejoint! C'est un cauchemar, ça ne s'arrêtera donc jamais? Je jette mes dernières forces dans le sprint du désespoir. Je ne sens plus aucune douleur, j'ai l'impression de voler, je dois faire au moins du 12km/h! ;) Je franchis la ligne en tête, ouf 2ème femme!


Arrivée au sprint (photo: Francis Blanchet)

Uxue arrive 8' plus tard. Sur 34h de course, cet écart est ridicule! Quel final quelle bataille jusqu'aux derniers mètres!

Avec Uxue à l'arrivée (photo: Francis Blanchet)

Au final je termine donc la course en 34h17, 30ème scratch sur 1147 finishers (3%), 2ème féminine. Cette performance était inespérée. Je pensais le top10 féminin réalisable, je rêvais d'un top 5 et me voilà 2ème! Ceci étant dit, je suis consciente d'être passée tout près de la 3ème place et très loin de la 1ère: je n'aurai jamais vu Nathalie Mauclair qui finit avec presque 3h d'avance sur moi! C'est juste un autre monde. Il y a les extraterrestres et les terrestres derrière. Je suis fière d'être 1ère terrestre! ;)

Postdiagonale: la remise des médailles le lendemain est un moment très fort avec beaucoup d'émotions. Je suis fière d'être sur le podium avec de si grands champions et championnes.

Podium scratch du grand raid (photo: Thimothee Nallet)
Ce que l'histoire ne dit pas c'est que je finirai cette soirée mémorable aux urgence de St Paul! En effet depuis l'arrivée l'état du genou gauche sur lequel j'ai chuté en début de course a empiré. A la remise des prix déjà je ne peux plus plier le genou d'un iota! Finalement plus de peur que de mal: ce n'est qu'un gros bleu interne. Qui me faudra tout de même une belle attelle pendant 3 jours!

Remerciements: Chaleureusement, sincèrement, du fond du coeur je souhaiterais remercier tous ceux qui ont fait que cette diagonale soit une réussite:
- mon "staff" de luxe d'abord: Cyril, Adrien, Jenny, Sophie, mes parents, Azzedine, Lydie, Mirella et Menza. Vous êtes pour beaucoup dans ma motivation pour finir, et bien finir, ce grand raid.

Et voici le staff Blanchet (photos: Blanchet)
- Denis Fritsch pour m'avoir fait souffrir à distance deux fois par semaine sur les berges de l'Isère! J'étais prête pour ce grand raid et ça s'est vu!
- Ma famille, mes amis, mes collègues qui m'ont suivie et encouragée à distance le long de ces interminables 34h. Avec une mention spéciale à Patrick "de l'étage d'en dessous" pour les SMS de suivi live!
- Isostar pour son soutien et son team trail pour tous les excellents moments partagés, les fous rires, les délires de Pascal, les entrainements commando de Régis et le soutien indéfectible de ses trailmanagers, Manu et Guillaume.
- Les membres du TTT (son prez François en tête) pour le suivi live depuis Millau et ailleurs, et tous les moments de convivialité partagés.

Ainsi s'achève ma saison 2014. Merci à tous et à l'année prochain sur les sentiers!

samedi 23 août 2014

80km du GRP ou les Pyrénées par dessus les nuages

Une semaine avant la course je me réjouis de participer à ce 80km du GRP qui s'annonce de toute beauté, surtout que le coin sera une totale découverte pour moi:


Mais à J-5 patatra tout s'écroule, j'ai le moral dans les chaussettes et je ne suis pas sûre de prendre le départ. La faute à un (ou une) c*$&@$£% qui m'a piqué ma valise dans le TGV entre Paris et Narbonne alors que j'étais plongée dans un bon bouquin. Mais qui a dit qu'il était bon de lire!!! Cette valise, elle contenait tout ce que je mets ou pourrais éventuellement mettre pour courir: sac, chaussures, toute la tenue isostar, veste, lunettes, etc. Je me retrouve donc en short-tong à 600km de chez moi à quelques jours de la course. Je suis dégoutté, il y en a pour une petite somme mais plus que ça c'est sentimental. Je repense aux dizaines voire centaines d'heures que j'ai passées avec certains équipements. Ma veste de la TDS 2012! Mes lunettes de l'UTMB 2013! Les chaussures que je devais mettre pour la diag! J'envisage un moment ne pas courir le GRP. Comment pourrais-je faire de toute façon sans matos? Mais je ne tiens pas longtemps: cette course me tente, mon grand frère et sa famille seront là pour les encouragements, il faut que j'y aille. Seule solution faire chauffer la CB... Je pense qu'elle est encore chaude à l'heure actuelle!! Et puis grâce à Fanny d'isostar et Jenny ma belle-soeur, je récupère quelques Tshirt isostar. Pour le sac, problème de commande, ce sera donc le sac de Cyril un peu trop grand mais rempli au max, ça devrait passer.

Samedi matin donc, 1h avant la course, je mets pour la première fois le matos que j'aurai sur cette course. Sur la ligne de départ ça cogite pas mal: "Pourvu que le sac ne bouge pas trop! Pourvu que le short ne frotte pas!". Et dire qu'Isma dit toujours qu'il ne faut rien mettre de nouveau sur une course. Là j'ai juste la totale!! Bref, je ne suis pas sereine avant le départ, mais l'envie est là, alors...

Le départ se fait de nuit à 5h du mat (vive le trail) sous une petite bruine. Les premiers mètres dans le village de Vielle-Aure, sous les feux d'artifice et les fumigènes, sont juste hallucinants. Je n'ai jamais vu ça!

Départ d'anthologie sous les fumigènes! Photo Paul Vilcot. 

Les 20 premiers km sont très roulants, alternant larges chemins forestiers et route. Ce n'est pas trop mon truc, je trouve cela monotone. J'espère juste que les les chemins vont se rétrécir dans la suite... Heureusement que toute cette partie se fait de nuit et qu'avec ma tikka aux piles fatiguées je ne vois pas les longues lignes droites! Je fais le yoyo avec une fille, alternant entre la 3ème et la 4ème position.

 J'arrive au 1er ravito, au restaurant de Merlans (km14, 2h08 de course) en 3ème position. Je ne m'arrête pas. A partir de là le terrain devient plus avantageux pour moi: on emprunte des single techniques avec rochers qui glissent et racines qui glissent aussi. C'est plus le terrain de jeu que j'affectionne. Je n'ai pas l'impression de forcer le rythme, pourtant je passe peu après la 2ème féminine, puis la première vers le km25. Bon ben maintenant il va falloir tenir 55km.... J'apprécie beaucoup cette partie sauvage où on longe une multitude de lacs bleus. On a la chance d'être au dessus des nuages et je me régale.

Les gambettes de Juliette, en mode bronzage bicolore! Photo Yann Ilhardoy.


J'arrive au deuxième ravito, Artigues (km28, 4h21). J'y retrouve mon grand frère, ma belle-soeur et ma petite nièce. Ca fait plaisir de les voir. L'assistance c'est 20% de soutien matériel et 80% de soutien moral. Adrien me remplit les flasks en moins de deux et je repars. Au menu, une longue montée jusqu'au pic du Midi, la bagatelle de 1700m D+ en 10km. Bon ben yapluka.

Après une belle montée, j'arrive au col de Sencours où se trouve le 3ème ravito. Je n'ai pas prévu d'avoir de l'assistance ici et j'ai encore de la boisson alors je trace ma route. La montée jusqu'au sommet est très monotone: de larges lacets sur un large chemin. Pourtant je ne m'ennuie pas (trop): la vue est magnifique, c'est un régal pour les yeux, à défaut de l'être pour les jambes. On est au dessus des nuages avec seuls les sommets qui dépassent. J'adore!

Dans la montée vers le pic du Midi. Petite foulée mais grand sourire! Photo Paul Vilcot.
J'arrive au sommet, me fais badger puis repars illico. La descente se fait par le même chemin qu'à l'aller. Ces allers-retours, ce n'est pas ce que je préfère, pourtant je fais une bonne descente en m'efforçant d'encourager chaque coureur et coureuse qui monte au passage. Ces "allez allez" sont autant pour eux que pour moi.

Dans la descente du pic du Midi. Photo Yann Ilhardoy.
Je n'ai plus d'eau à mon second passage au col de Sencours et décide donc de m'arrêter pour recharger. Je n'avais pas prévu d'assistance ici mais mon frère m'a fait la (bonne) surprise de monter au col. En fait il est déjà reparti par peur de ne pas arriver à temps au prochain ravito, mais il m'a laissé quelques barres et surtout de la boisson. Un assistant en or!

Ravitaillée et repue, je continue la descente. A super Barèges, alors qu'on croise une route, je retrouve Adrien qui me rejoint pour faire quelques pas (de course) avec moi pendant que le reste de la family m'encourage depuis la kangoomobile.

La team Blanchet en action. Photo Jenny Stephenson.

J'arrive au ravito de Tournaboup (km50, 7h30). Quelques barres, boisson, deuxième sandwich du jour et c'est reparti.

Miam miam le sandwich jambon-kiri! Photo Jenny Stephenson.


Direction le col d'Hourquette Nère par un vallon sauvage qui est un régal. Je prends beaucoup de plaisir, je suis bien. Arrivée au col, je découvre de l'autre côté une vue IN-CRO-YA-BLE avec une enfilade de lacs bleus en contre-bas. J'hallucine comme c'est beau!

On descend jusqu'au lac de l'Oule, qu'on longe jusqu'au ravito de Merlans (km66, 10h37) où je retrouve mon assistant de choc. Un energy shot et c'est reparti vers le col de Portet. J'entend Jenny qui m'encourage, merci belle-soeur. La family me suit depuis la route sur le début de la descente, klaxon et "allez allez bravo", c'est sympa. Je déroule comme je peux, plutôt bien finalement compte tenu des 70km qui sont derrière moi. Je regarde ma montre, je suis en avance sur mon plan de marche de 12h30, tellement en avance qu'en se bougeant un peu les moins de 12h sont encore possible. Challenge accepted! Je force, relance, je n'ai aucune place à gagner, même pas au scratch, mais un challenge est un challenge. Cette descente me parait longue mais je tiens. J'arrive à l'entrée du village de Vieille Aure. Petit coup d'oeil à la montre, ça va être chaud mais c'est possible, allez allez, il faut tenir!

Dur dur les derniers mètres! Photo Cyril Pérot.

Voilà la ligne que je franchis. Délivrance! Coup d'oeil au chrono, oui c'est bon... quoique en fait non, le chrono ne s'arrête pas à la ligne mais lorsque les bénévoles badgent, ce qui doit bien me prendre 30" car ça bouchonne!! J'ai peur un moment d'avoir raté les 12h mais ouf, ça passe à 20" près: 11h59'40". Je suis 1ère femme et 19ème/790 au scratch (2%).

A l'arrivée avec la banane et la médaille.

Contente évidemment de cette première place et de cette bonne place au scratch. Mais surtout contente de cette course très bien gérée. Je n'ai eu aucun coup de moins bien, j'ai réussi à bien m'alimenter sur toute la course. C'est sûrement ma course la plus aboutie. Je crois bien que c'est l'effet-grand-frère!! ;) Mais ceci n'était qu'une répétition: Blanchet family, RDV dans 9 semaines, plaine des merles à la Réunion! Avant cela, au programme un peu de récup puis direction Serre Chevalier. To be continued...


vendredi 27 juin 2014

Ma première "course au ciel": les 80km du Mont Blanc

10 mois après l'UTMB, retour dans les rues de Cham' pour ma première course de Syrunning, "course au ciel" pour les non-anglophones. Car oui, nous traileur on court le ciel, rien que ça! ;) Cette année le 80km est la course du championnat du monde d'ultra skyrunning. Le parcours a l'air magnifique et le plateau tout aussi relevé (championnat du monde oblige). Je suis contente de pouvoir "rencontrer" (de loin!) le gratin féminin dont on parle dans les journaux spécialisés. Je ne me fais pas d'illusion, nous ne vivons pas sur la même planête trail, mais cela sera un bon test pour voir où j'en suis. Et une bonne prépa pour la diag'.

Voilà donc ce qui nous attend: 80km/6000m+ selon les organisateurs, jusqu'à 90km/7000m+ selon certains GPS.


10' avant le départ, je suis sur la place de l'amitié à Cham' et j'entre dans le sas. J'y croise Mayou et Mick du TTT, puis Jean-Phi, Mr TraceDeTrail s'il vous plait. Cyril se place un peu plus derrière, préférant partir tranquille. Je suis placée plutôt devant mais à distance respectable des élites. Nous ne jouons pas dans la même cour!

Photo: Salomonrunning

4h pétante, le départ est donné pour quelque 1200 traileurs inconscients. Quelques minutes de bitume à peine pour traverser Cham', puis on attaque déjà la première montée qui nous menera jusqu'au Brévent (2450m). La bagatelle de 1500m+ sur les 8 premiers km, le ton est donné! Je monte bien, à mon rythme tranquille de début de course. Cyril me rejoint aux 2/3 de la montée. Le jour se lève petit à petit, découvrant une vue magnifique sur le Mont-Blanc.

Le jour se lève dans la montée du Brévent (Photo: Timothé Nalet

J'arrive au Brévent, premier sommet du jour, avec Cyril sur mes talons (1h47, 156ème). Je prends la poudre d'escampette dans la première descente, doublant une vingtaine de coureurs dont quelques féminines. Je passe Planpraz puis la Flégère sans m'arrêter (2h35, 124ème).

On rejoint un sentier en balcon jusque la Tête aux vents. Ce sentier, je le connais bien, je l'ai fait il y a 10 mois dans l'autre sens sur l'UTMB. Eh ben autant vous dire qu'il a beau être montant dans ce sens, il me paraît bien plus facile qu'il y a 10 mois après 29h de course! Nous sommes pile en face du Mont Blanc. La vue est extraordinaire, avec juste quelques petits nuages en collerette autour de ce massif majestueux. Impérial!

On continue à remonter l'UTMB jusqu'au col des Montets. Je continue ma progression. J'arrive au Buet (3h51, 110ème) où je retrouve Manu, le manager du team qui va me faire l'assistance sur la course (un grand grand grand merci à lui!). J'attrape quelques barres, remplis mes bidons puis repars. Je n'ai pas eu la présence d'esprit de lui laisser les quelques affaires chaudes en trop que je baladerai pour rien jusque Vallorcine, 4h plus tard.

Je repars à l'assaut du deuxième sommet du jour à travers le val de tré les eaux. Cette montée, je l'avais déjà faite en juillet dernier lors de ma semaine choc dans la région. Je sais que ça va être long, très long! Et le pire c'est qu'après ça, ce n'est pas fini! Je prends donc mon mal en patiente et monte tranquillement. Je rejoins Jean-Phi qui n'est pas bien. Je le double, essaie de l'encourager pour qu'il tienne le coup mais il n'est vraiment pas au mieux (il abandonnera malheureusement à Vallorcine, n'ayant pas résisté à l'appel du jaccuzi en famille ;)). Cette montée est dure, il y a beaucoup de rochers à enjamber mais qu'est ce que c'est sauvage, qu'est ce que c'est beau! J'arrive au col des corbeaux (6h00, 94ème), encore enneigé. Le contraste entre la neige blanche, le ciel bleu azur et les montagnes majestueuses me laisse baba.

On longe le lac vert, trace vert éméraude au milieu de la neige blanche. Le festival des yeux continue! Je passe le col de la terrasse, deuxième sommet du jour, d'où on bascule sur la descente vers le lac d'Emosson. Les premières centaines de mètres de D- se font dans la neige. Je skie avec mes NB, manquant souvent de tomber mais m'amusant comme une gamine!

Emelie Forsberg, lauréate du jour, toute en élégance dans le descente. Je passerai en ce point près d1h plus tard... (Photo: http://www.droz-photo.com/)

Arrivée au lac d'Emosson (6h40, 82ème), je remplis mes bidons puis repars sur un chemin en balcon des moins roulants. Il faut souvent mettre les mains, c'est crevant et on n'avance pas. Un peu déprimant pour tous, même si aujourd'hui avec la vue qu'on a sous les yeux on peut difficilement se plaindre! Enfin arrive le chalet de Loriaz, puis la descente vers Vallorcine. J'ai en ligne de mire une féminine, Li Dong (Chine) que je rejoins. A ce moment évidemment je ne le sais pas, mais on jouera à cache cache ensemble sur les 40 prochains km!

Lorsque j'aperçois les premiers bâtiments de Vallorcine, je me dis à tort que le ravito est juste là. Que nenni, pour une raison qui m'échappe l'orga a décidé de nous faire faire une boucle des plus inintéressantes avant de rejoindre le ravito. Je pense qu'à ce moment beaucoup commencent à fatiguer et cette boucle inutile est un coup au moral. Enfin voilà ravito où je retrouve Manu (7h59, 70ème). Bidons, barres, gels, je fais le plein. J'ai cette fois la présence d'esprit de laisser les affaires que j'avais pris pour la nuit (sauf la frontale! merci au gentil spectateur que me l'a fait remarqué).

Je repars en direction de l'aiguillette de Posette. Li Dong repart avec moi, mais elle semble un peu moins à l'aise sur cette partie raide et perd petit à petit quelques centaines de mètres. Malheureusement pour moi, à mi-montée on rejoint un chemin forestier bien large bien plat comme je ne les aime pas. Je sais qu'il faudrait courir mais à ce moment là je n'en ai pas la force (en fait surtout pas l'envie: c'est maladif, je n'arrive pas à courir sur les chemins que je trouve monotones). Je suis la rubalise le long des virages. Arrivée en haut du 2ème, je m'aperçois que j'étais il y a quelques minutes juste 50m plus bas. Et Li Dong, voyant cela, coupe tout droit pour éviter les zigzag (comme d'autres avant elle sûrement). Sur le moment je suis énervée car il est clair qu'elle va gagner quelques minutes précieuses comme cela. Je cogite toute seule, c'est idiot car 1) ça ne sert à rien de perdre de l'énergie pour ça, 2) je ne le sais pas encore mais de toute façon ce n'est pas ces 1-2 minutes de gagner ici qui changeront quoique ce soit au classement final (spoiler: Li Dong arrivera 10' devant moi), 3) je n'aurais pas osé le faire sur une course mais franchement je la comprends: quelle est l'utilité de ces grands lacets?

J'arrive à l'Aiguillette des Posettes (8h57, 68ème). Et là je découvre, ou plutôt re-découvre, une vue in-cro-ya-ble à 360 degrés. C'est juste à couper le souffle. Le Mont-Blanc, toute la vallée, franchement c'est fou! La descente qui suit est plutôt technique, ce qui me va bien. Je double quelques coureurs et rejoins Argentière où je fais le plein de boisson. Je sais que ce qui va suivre n'est pas ma tasse de thé: 8-9 km presque plat où il va falloir relancer. Je cogite peut-être un peu trop là dessus car je rate une bifurc (peut-être mal indiquée) et me retrouve plus bas dans Argentière. Mince flûte p*****!!! Un VTTite qui passait par là me prend sous son aile et c'est sous sa direction que je coupe à travers la forêt pour rejoindre le chemin, enjambant souches et troncs d'arbes, lui avec le vélo sur le dos. Gentil VTTiste, si tu passes par là, un grand GRAND merci!

Pile lorsque je déboule sur le chemin, je tombe sur Li Dong. J'avais fait un petit trou mais j'ai tout perdu en quelques secondes d'inattention. Un gros coup au moral pas de quoi m'achever. Le suspense reste entier pour la 10ème place F (bon ok, à part nous deux -et encore- tout le monde s'en fout) Sur les km qui suivent, roulant, elle est sûrement plus à l'aise et je force un peu pour la suivre. C'est peut-être d'ailleurs mon erreur. Toujours est-il qu'on arrive ensemble aux Bois (11h05, 64ème) où j'attrape une barre de Manu en passant et repars illico. Li Dong me rejoins quelques minutes plus tard. Je fais le début de la montée devant mais en fait je m'aperçois vite que je commence à ne plus rien avoir dans les jambes. Argh la fin risque d'être longue! Lorsque le chemin devient plus plat, Li Dong reprend une petite foulée que je ne peux suivre. Elle se retourne plusieurs fois pour m'encourager à la suivre (merci à elle, c'était vraiment sympa comme geste) mais je ne suis vraiment pas bien et je décide de ralentir pour m'alimenter et assurer la fin du parcours.

J'arrive bon an mal an à Montenvers (12h28, 64ème) où la vue sur la mer de glace est grandiose. Franchement sur ce parcours on en prend vraiment plein les yeux! C'est presque trop! Je continue sur un chemin en balcon. J'ai repris un peu du poil de la bête, essaie de relancer quand je peux (c'est à dire pas souvent). Je ne m'arrête pas au ravito du plan de l'aiguille (13h31, 64ème), je veux en finir au plus vite! "Vite" est un grand mot car en fait la dernière descente est interminable. Ca tourne, tourne et retourne. Chamonix est juste en bas pourtant j'ai l'impression qu'on ne s'en approche jamais. Enfin voilà les première ruelles et la dernière ligne droite. Je vois Manu derrière l'arche avec l'appareil photo. Juste pour le fun, je sprint jusqu'à l'arrivée (14h20, 59ème). J'ai la grosse banane: heureuse d'être allée au bout avec une course régulière, heureuse de m'en être mise plein les yeux. Heureuse de voir Manu heureux pour moi. Bref heureuse!

Les joies de l'arrivée

Au final je finis 10ème F, 59ème scratch sur 1200 au départ et 570 à l'arrivée (10%). Je suis loin, très loin des meilleures filles (1h40!!!) mais à mon modeste niveau j'ai fait une bonne course. Et encore plus important j'ai pris beaucoup de plaisir. Alors certes, le parcours est usant, peut-être trop. C'est plus du "skyhiking" que du "skyrunning" mais franchement niveau paysage j'ai jamais vu mieux. On en prend plein les yeux durant 80km. Le plaisir des yeux, l'enfer des mollets!

Comme toujours, un grand merci à tous les bénévoles, à Manu pour l'assistance de choc et à tout le team pour ces très bons moments partagés ensemble.

dimanche 25 mai 2014

Délégation TTT au trail de l'Oisans

Le trail de l'Oisans, je n'avais a priori pas prévu de le faire. Mais en entendant Mayou vendre la course et son ambiance, la présence de plusieurs TTTeux, je ne résiste pas. C'est donc parti dimanche pour un covoiturage matinal avec Mayou. Lui est sur le 50km, de mon côté ce sera le 36km. Voilà ce qui m'attend... enfin c'est ce qu'on croit tous!



Car sur la liste de départ, JM, traceur du trail de l'Oisans et membre émérite du TTT, nous apprend que nous ne passerons finalement pas au lac fourchu qui devait être le point culminant de la course. Mince alors, je me faisais une joie de passer là haut. Du coup je n'ai pas trop compris ce que nous allions faire mais on verra bien.

Le départ est donc donné. Nous sommes très peu sur la ligne de départ, une cinquantaine. Ca commence par un faux plat descendant puis une quinzaine de km roulants dans la vallée. Je prends un rythme tranquille, je veux garder de l'énergie pour la grande montée. J'en profite pour regarder les sommets de cette vallée que je ne connais pas, non sans me dire que quand même je préfèrerais la quitter cette vallèe et aller les voir de plus près ces sommets!



Somme toute, cette partie roulante passe assez vite et me voilà au pied de la grosse difficulté du jour, 1000m de D+ sur 5km. Je m'attache à prendre un rythme régulier, je monte plutôt bien, maintenant il faut tenir les 1000m+ comme ça. Un concurrent du 50km me rejoint, il restera dans mes pas sur toute la montée. Je garde mon rythme, double plusieurs concurrents. Monter j'aime ça!

En plein effort dans la montée (photo: http://oisimages.com/)

Alors qu'on arrive juste en dessous du refuge du taillefer, un bénévole me dit que pour le 36km, c'est à gauche en redescendant. Je quitte donc mon coureur du 50km qui lui continue vers le plateau et le lac fourchu situés juste au dessus. j'avoue qu'à ce moment je suis très frustrée. Monter 1000m+ pour s'arrêter à quelques mètres du plateau et de sa vue magnifique, quel dommage quand même! J'apprendrai plus tard que l'orga n'a pas eu l'autorisation d'y faire passer le 36km, malgré tous leurs efforts auprès des autorités. Quel dommage!

Je suis à sec de boisson. C'est de ma faute, j'ai zappé le dernier ravito, mal renseignée il faut dire par une bénévole. Note pour plus tard: ne jamais écouter les bénévoles! ;) Donc à sec, je remplis une de mes deux flasques dans la première rivière sur la descente, puis la deuxième juste avant la remontée finale. Mauvaise idée! Je suis assez bas, l'eau doit être souillée, ce qui me vaudra 5 jours très difficiles d'un point de vue gastrique. Je n'ai jamais autant vu ma salle de bain!

Dernière remontée jusqu'à l'arrivée. Ce n'est pas très raide, j'arrive à courir la plupart du temps. Certes pas vite, mais j'avance quand même. Une dernière petite difficulté concoctée par JM juste pour le fun et je franchis l'arrivée en 4h35, 1ère féminine, 10ème scratch/47 (21%). C'est mon deuxième top10 scratch d'affilée après l'ultra Ardéchois. Bon certes, avec 47 arrivants au total, c'est déjà plus facile!

Marie du TTT m'accueille, malheureusement blessée, puis Ismail, Philippe, Mayou arrive juste un peu plus tard (6ème du 50km, bravo le team Bouloud!). On passe une aprem sympa entre le ravito mémorable (vive les produits locaux!), le repas d'après-course et les nombreuses courses enfants, tout heureux de s'adonner eux aussi à la course.

Départ à donf d'une des nombreuses courses enfants (photo: Marie)

Au final un excellent dimanche sur un trail qui mériterait largement d'être plus connu de part son ambiance familiale en toute décontraction. Un petit bémol peut-être pour le parcours du 36km qui pourrait être revu l'an prochain si nous n'avons pas l'autorisation de monter au lac fourchu (ce que je ne souhaite pas!). Encore un grand merci à JM, aux organisateurs et aux bénévoles, c'est grâce à vous que l'on peut vivre ça!

samedi 3 mai 2014

L'ardéchois: enfin le retour aux choses sérieuses :)

Premier ultra de cette année 2014, voici l'ultra Ardéchois, 98km pour 4800m+. Voilà ce qui m'attend:


Vous avez peur? Eh ben moi aussi!!

Samedi 3 mai, 2h moins le quart avant jésus christ, le réveil sonne. 2h moins le quart du mat' je précise. On est des traileurs quand même! Je me lève en essayant de faire le moins de bruit possible pour ne pas réveiller mes dormeurs-traileurs: Yann, Murielle, Régis, Frapadinguepascal et Cyril évidemment. Je prend le petit dej sur la machine à laver à la lueur d'une bougie. Rien d'anormal jusque là!!

Je pars un peu à la bourre et arrive in extremis sur la ligne de départ. C'est une habitude qui me colle à la peau! Tellement à l'arrach que j'ai oublié de prendre mon coupe vent. Mais c'est pas comme si le vent allait souffler sur les 98 prochains km hum... Un petit tour du village pour de rire au milieu des fumigènes puis top départ.

On attaque direct par 10km de montée pour se mettre dans l'ambiance. Je pars à un rythme correct. Je vois tout de suite que j'ai de bonnes jambes, c'est plutôt de bonne augure. Je me demande juste si je ne pars pas un peu vite quand même. C'est mon premier ultra de la saison (tu m'étonnes on est en mai!) et je n'ai pas encore tous mes repères.

Il fait nuit noir. Normal il est 3h du mat... Une petite bruine nous accompagne, un peu de brouillard aussi pour nous donner du courage. Bref pas grand chose à voir en dehors des poils aux jambes (musclées) des mâles devant moi (quoique je m'aperçois que pas mal sont épilés, y a plus de saison ma p'tite dame!). Je ne sais pas si c'est ça qui détourne mon attention ou si le balisage est light mais vers le km15 je rate une bifurc à gauche. Quelques minutes plus tard je vois des frontales remonter vers moi, c'est Aurélien suivi d'une petite dizaine de coureurs. Tous se sont trompés comme moi. On remonte le chemin en ramassant au passage d'autres moutons égarés. On doit bien être une vingtaine dans l'affaire. On retrouve enfin la dernière rubalise et l'épingle à gauche. Je comprends qu'on l'ait raté: à cet endroit comme d'autres sur cette partie de nuit, le balisage me semble un peu trop léger (pas assez de balises fluos, pas assez de signes au sol). Je repars derrière Aurélien, je suis la tête dans ses grosses semelles-to-fly pour cette partie technique qui me plait. On double quelques concurrents qui eux ne s'étaient pas trompés, dont une féminine, Manikala Rai (qui finira 2ème de la course). Aurélien, vous vous en doutez me lâche dès que ça redevient roulant mais abandonnera quelques km plus tard pour moral dégonflé suite à son jardinage (il repartira en fait sur le 57km quelques heures plus tard pour finir 4ème!).

Arrive le 1er ravito (km22, St-Jean-Roure), je ne m'arrête pas. Eh oh il y a 3 ravito solides sur 98km, je ne vais quand même pas m'arrêter partout!! La 2ème bosse passe bien, je cours presque tout le temps. Deuxième "sommet" du jour (km26). On est en fait au même point que 15km plus tôt, aux pieds d'éoliennes que cette fois je vois (le jour s'est levé). Dans la descente qui suit, je rattrape un concurrent que j'ai déjà croisé plusieurs fois depuis le départ. Je me souviens de lui, c'est pas courant, il porte une peluche oui-oui à son sac et des longs batons en bois. Je ne le sais pas encore mais ce traileur encore inconnu de moi sera mon compagnon d'échappée sur les 70 prochains km!

Deuxième ravito (km40, Labatie d'Andaure). Je m'arrête juste le temps de remplir à moitié mes bidons. Mon traileur inconnu me rattrape quelques instants plus tard. 3ème bosse qui se termine droit dans la pente à travers les genêts jusqu'aux ruines du château de Rochebloine (km44) d'où la vue à 360 degrés est magnifique. Je prends bien 2 secondes et demi pour regarder le paysage. Nous les traileurs on profite de la nature!!

4ème bosse dont je ne me rappelle plus bien à part que ça montait! Il me semble que c'est dans cette montée que mon bel inconnu voit pour la 1ère fois son fan club. Du coup j'en profite pour apprendre son petit nom: Dominique. Quelques km de descente plus loin, voilà un point d'eau que j'accueille avec plaisir puisque je suis à sec. Je repars avec "Domi". 5ème bosse bien raidasse puis, dans la descente qui suit, le 2nd ravito (km62, Rochepaule). Je remplis intégralement les bidons (j'étais encore à sec), mange trois fois rien puis repars. Domi me rattrape. Je me dis que c'est la 1ère fois que je cours aussi longtemps avec quelqu'un, et ce n'est pas fini!

6ème bosse et dernière grosse bosse jusqu'au lac de Devesset (km72) où Domi retrouve son fan club. Je commence à puiser un peu et Domi est obligé de lever le pied pour que je puisse rester dans ses baskets. Je lui répète "vas-y pars ne m'attends pas" mais c'est qu'il est têtu le bougre, il a l'air bien décidé à finir avec moi! Que voulez-vous, je suis faible avec les hommes (surtout s'ils sont musclés), je fais mon max pour rester dans ses baskets. On entame le tour du lac par les tourbes (chaussettes mouillées garanties... sauf pour Domi nu pied dans ses runnings!). Un concurrent nous double à mi-lac. Domi n'entend pas se laisser faire. A partir de là ce sera une guerre des nerfs sur 10 prochains km pour refaire notre retard sur le méchant traileur qui a osé nous doubler. Je force pour ne pas ralentir Domi qui a l'air autant décidé à le rattraper qu'à finir avec moi. Il me dit "il est cramé ça va le faire", je pense tout bas "je suis cramée ça va pas le faire". Pourtant on le rattrape ce méchant traileur au dernier point d'eau (km83, St Jeure D'Andaure). On repart tous les trois ensemble. J'ai envie d'allumer le calumet isostar de la paix et qu'on finisse ensemble mais les hommes sont décidés: ce sera la bagarre! Du coup je tente le coup dans la descente un peu technique qui suit. Je lache les quelques forces qu'il me reste et passe devant "mes" hommes. Le méchant traileur perd quelques mètres, qu'il reprendra aussi sec sur le prochain plat. Là mon peu de motiv se dégonfle: plus la force, plus le courage de continuer la bagarre. On laisse partir le méchant traileur et on finit les 10km suivants tant bien que mal sur nos deux pieds. Domi m'attend presque à chaque pas. Je suis fatiguée, les jambes gorgées d'acide lactique, ça me parait interminable (on perdra 6' sur Teddy Roseau, le fameux méchant traileur).

Enfin voilà les rues de Désaignes. On arrive sous les applaudissements des nombreux supporters. Ca fait chaud au coeur croyez moi.

Avec Domi dans les derniers mètres. Admirez ma foulée aérienne! :)

Domi, en grand gentleman, me laisse franchir la ligne d'arrivée la première. Verdict: 13h09, 1ère féminine et 8ème scratch/150 (5%). C'est mon premier top10 homme, croyez-moi ça donne le sourire.




J'apprends en même temps que Régis a gagné avec Augustin le 36km quelques heures plus tôt. Une belle moisson isostar!

Les iso-stars du jour (Régis est à gauche, en bleu je précise!!)

Avec Régis dans les rues de Désaignes
Merci à Cyril, Yann, Murielle, Régis pour ce week-end très sympa, à toutes les personnes qui m'ont encouragée sur le parcours, à Loulou Chantre dont c'était le bouquet final. Et surtout un grand merci à Dominique Fabregues, mon lièvre de rêve. Ce top10, c'est grâce à lui!

dimanche 13 avril 2014

La Drôme version TTT

Nouvelle étape dans le sud, 3 semaines après le Ventoux, pour le trail Drôme à Buis. C'est aussi le 1er rassemblement club du TTT que je viens de rejoindre. JMG, notre chasseur-traileur, nous a dégotté un gîte isolé d'où la vue est de toute beauté. François notre prez nous apporte les Tshirt et visières aux couleurs du club, l'occasion d'une petite séance shooting du club le plus fluo de France!

Le TTT en chair et en couleurs. Cherchez Charlie (un indice, il est en noir).

Le lendemain, voilà ce qui nous attend... enfin en théorie!


Je sais que ce sera une course rapide où il faudra partir vite (toute proportion gardée, c'est le diesel qu'on parle!). Une fois n'est pas coutume, je m'échauffe. Bonne nouvelle: les jambes n'ont pas l'air si mal malgré les gros entrainements de ces 8 derniers jours. Mauvaise nouvelle: le petit dej ne passe pas bien. C'est un problème que je pensais avoir plus ou moins résolu, apparemment il reste encore du boulot. Enfin bref, on verra bien, ça ne devrait de toute façon pas m'empêcher de finir.

Je me place sur la ligne de départ, juste à côté de Mayou et juste derrière la ligne élite réservée aux plus rapides. Ben quoi, toute le monde ne s'appelle pas Michaël Peyrin!! ;)

Les élites et le reste du monde :)

Hop, c'est parti. Ca part vite et comme je le craignais mon estomac fait des siennes. J'ai envie de vomir et la monotonie des 5 premiers km -du bitume, du bitume, du bitume- ne fait rien pour arranger les choses. Je digère au fur et à mesure que les km passent et finalement passée la première heure je n'y penserai plus. De manière générale, on prend sur cette première boucle quelques single sympa avec une belle vue dégagée, mais il faut bien dire que la plupart du temps c'est soit des gros chemins, soit de la route. Moi qui avais entendu dire beaucoup de bien de cette course, je suis déçue.

Voilà le 1er ravito, je ne m'arrête pas. Peu après, je m'égare avec un groupe d'une dizaine de coureur. On revient en arrière, on voit à gauche de la rubalise et on rejoint ainsi le parcours. La montée continue sur quelques km, puis c'est la descente sur Buis. Juste avec d'y arriver, une féminine qui courrait avec moi me dit qu'elle va arrêter car elle ne prend pas de plaisir et parce qu'on a coupé. Parce que quoi??? Attend, quand est-ce qu'on a coupé? Là elle me dit que quand on s'est perdu on a coupé une boucle. Je suis baba, je n'ai rien vu rien compris. Ce n'est pas mon genre de couper, au contraire je suis plutôt du genre à me rajouter des km, cf Ventoux 2013! Je commence à cogiter, est-ce que je dois m'arrêter, combien on a coupé etc etc. Voilà Buis, qu'est ce que je fais? Finalement je décide de continuer sans même m'arrêter au ravito de peur de changer d'avis.

On continue donc sur notre lancée avec plusieurs km de bitume. Décidément les organisateurs nous ont gâtés, ça c'est du trail! Je prends tellement mon pied sur la route (hum hum) qu'avec quelques coureurs on décide d'en rajouter une couche: en fait on rate une bifurc à 90 degré vers un single. On met quelques minutes à s'en rendre compte, demi-tour, on voit la rubalise, c'est reparti. Un single pour commencer, puis de nouveau une grosse piste monotone jusqu'au 3ème ravito. Voilà la montée finale, raide et sur un beau single où je retrouve des sensations de trail. 32km depuis le départ, il était temps... J'arrive au sommet, reste juste à descendre. Une descente technique comme je les aime, surtout sur le début. Je double du monde, rejoins Mick, notre élite du TTT :) On est dans Buis, j'entend le micro. Mick et moi on lache les chevaux pour les derniers mètres... sauf que ce n'est pas du tout les derniers mètres!!! L'orga nous a fait une surprise: 2km de rab sur le bitume, juste pour le fun! Ce n'était pas sur la trace du parcours. On s'éloigne de plus en plus du micro, à un moment je pense même que ce n'est pas possible, on a du se tromper... mais non, même pas! Je craque un peu, Mick aussi, mais enfin on voit la dernière ligne droite. On passe la ligne main dans la main... enfin Mick en grand galant s'arrange quand même pour me dépasser d'un cheveu! ;)

Passée la ligne, je vais voir les organisateurs pour leur dire que j'ai apparemment zappé une partie sur la 1ère boucle, à eux de voir s'ils veulent me classer. Ils me répondent qu'en fait on est pleins comme ça, même devant, et qu'ils gardent les classements. Je suis mitigée: d'un côté je suis contente d'être classée, d'un autre côté je n'aime pas me dire que je ne suis peut-être pas à ma place. Au final, mon temps "officiel", c'est 4h25, 9ème F, 71ème/362 (20%), mais je ne peux m'empêcher de penser que c'est peut-être plus que ça. Enfin ça ne m'empêche pas de dormir non plus... ni d'avoir le sourire!

Elle est pas belle la vie en isostar? :)


Les isostar girls et les fluos boys. Un énorme bravo à Elisa B. qui gagne le 25 km, manche du TTN, la classe!!
Merci à tout le TTT pour le week-end, Mayou, Mick, Aurélie, Marie, Kathlyne, Isma, Robin, Cyril, François, JPG, Ricardo, j'en oublie pleins d'autres. C'était un excellent week-end!


dimanche 16 mars 2014

Le Ventoux: l'histoire continue!

Le Ventoux et moi c'est une longue série d'échec: j'y suis déjà venue à 3 reprises et pourtant je n'ai jamais réussi à en atteindre le sommet. La première fois devait être il y a 10 ans, déjà pour le trail du Ventoux. C'était presque une autre vie: à l'époque on devait être une centaine de coureur au départ et le 40km me paraissait surhumain. Je m'étais contentée du 20km qui était déjà toute une aventure pour moi! L'année suivante je suis de retour mais en spectatrice avec deux côtes cassées suite à une chute dans une rivière en hors piste (fallait pas essayer de suivre le grand frère). L'an dernier 3ème tentative mais pour cause de mauvais temps le parcours ne peut rallier le sommet. Argh! Cette année je suis bien décidée à vaincre la fatalité!!! Pourtant quelques semaines avant le départ, je tremble: il y a de la neige à partir de 1000m, on parle déjà d'un parcours de repli, adieu le sommet. Mais 2 semaines de beau temps auront raison d'une grosse partie de l'enneigement et les organisateurs nous annoncent que nous passeront au sommet... enfin presque en fait (spoiler)!

Le parcours de cette année est donc légèrement modifié par rapport au parcours "habituel" (mais y-a-til vraiment un parcours habituel au Ventoux?). Certains parlent de 49km et 2900+ mais cette trace gps donne 46km 2300+.

 

Comme l'an dernier, retour dans la bastidon Kogler avec la dream team de Bélézy: Lauriane, Pierre, Mayou, Cédric, Cyril et moi. Samedi soir, chef Cédric nous concocte une pasta-gatosport party mémorable. Il faudra décidément le réinviter! On passe une bonne soirée très sympa. Même le Mayou a le sourire malgré la défaite du XV de France, c'est pour dire!

La dream team de Bélézy tout sourire avant la bagarre! 

Dimanche matin, on rejoint ensemble Bédoin en trottinant pour s'échauffer. Une fois n'est pas coutume, je me place relativement loin de la première ligne pour le départ. L'an dernier, prise par l'élan des plus rapides, je m'étais asphyxiée à partir trop vite (au moins 12km/h sur le plat, pour dire! ;)). Cette année je préfère partir mollo pour assurer. Surtout que le moral n'est pas au beau fixe quant à ma forme: depuis quelques semaines je me sens tout raplapla, sans énergie, toujours fatiguée. J'ai entamé un cure de magnésium et de sommeil depuis quelques jours. J'ai l'impression que ça va mieux mais je sais pertinemment que de toute façon ce ne sera pas la forme de ma vie. Bref, je me dis qu'il vaut mieux assurer.

Je pars donc à mi-peloton mais rapidement je me rends compte que ce n'était finalement pas une si bonne idée que ça. D'abord mes jambes n'ont pas l'air de mal tourner (au moins 10km/h sur le plat, pour dire! ;)). Ensuite je suis rapidement bloquée par des bouchons dès que le chemin rétrécit ou qu'une difficulté se dresse. J'enrage un peu de ne pouvoir suivre mon rythme naturel mais je prends mon mal en patience. Zen, restons zen. Je serai comme cela sur un faux rythme jusqu'à la bifurc du K14, peu après le 1er ravito, où les coureurs du 20km nous quittent. Ensuite c'est un peu moins dense et on rejoint de toute façon rapidement une route enneigée où l'on peut facilement doubler. Je ne trotte pas vite mais bon an mal an je remonte quelques coureurs (dont quelques féminines). Le vent commence à souffler, le froid se ressent, je remonte les manchettes. J'aperçois Cyril au loin et le rattrape. Je me dis "chouette, on va pouvoir faire un bout ensemble" mais j'aurais dû retenir la leçon du Salève: dès qu'il me voit dans ses pas, il accélère et je ne peux le suivre. Il me dira plus tard qu'il n'a pas fait exprès de me larguer, qu'il pensait au contraire que ça allait me tirer. Ouais tu parles Charles!!!!

Avec le sommet en ligne de mire (à ce moment j'y crois encore...). Photo piquée ici.

A l'approche du sommet, le vent souffle de plus en plus. Les rafales sont hallucinantes. Je suis baladée de droite à gauche. Mon poids plume ne fait pas vraiment le poids (c'est le cas de la dire!) face au déchainement du vent. C'est une lutte de tous les instants. J'arrive enfin sur la crête (K19) dans une bourrasque effroyable. Et là oh malheur, qu'est ce que je vois!!! On ne passera pas au sommet, on est juste 10m au dessous!! Pour le sommet c'est ENCORE raté!!

On continue sur les crêtes sud. Le vent est toujours hallucinant. Certaines bourrasques doivent atteindre les 100km/h. J'essaie de profiter de la vue qui pour le coup est de toute beauté mais avec ce vent, impossible de relâcher mon attention de mes pieds (qui sont eux moins de toute beauté). Je regarde les autres coureurs, la photo vaudrait le coup: on court tous penchés à 45 degrés. Pour aller droit, facile, il suffit de faire comme si on tournait à 90 degrés! C'est rigolo cette histoire mais c'est épuisant. Je rêvais avant le départ qu'on ne nous shunte pas les crêtes (comme un moment envisagé), je rêve maintenant de la route en contrebas, bien plate, bien droite, bien chiante... mais bien à l'abris de ce $!#$*# de vent!

On quitte (enfin!) les crêtes et la neige au K23, juste avant le ravito du chalet Reynard. Je vois Cyril juste devant moi qui s'arrête. Qu'à cela ne tienne, j'en profite pour le doubler sans m'arrêter. Il a voulu la guerre, il l'aura! :) On continue à descendre pendant quelques km puis suivent 10km de montagnes russes qui vont s'avérer interminables pour mes jambes de grenouille en ce début de saison. Ca monte, ça tourne, ça monte, ça remonte, ça tourne, ça remonte. Mais p***** quand est-ce qu'on descend??? Il fait de plus en plus chaud (choc thermique assuré: plus de 20 degré d'écart avec le Ventoux où j'étais 1h plus tôt!). Je souffre, inutile de le préciser! Mais le parcours est vraiment sympa, jamais monotone, je tiens. Je passe le 3ème ravito, m'arrête à peine. Je veux juste en finir! Je rattrape presque une féminine (je ne la reconnais pas mais c'est Mélanie Rousset avec qui je me suis perdue l'an dernier presque au même endroit!). Elle n'est pas loin mais je n'arrive pas à la rejoindre. Je commence à avoir les jambes sacrément dures. Au dernier ravito, K36, c'est une autre féminine (Christine Grosjean) qui me double. Elle en a vraiment gardé sous la pédale car son rythme est impressionnant, belle gestion de course!

Arrive enfin la combe de Maraval, c'est la descente infernale! C'est raide et caillouteux mais magnifique, des grottes, des canyons, des rochers. Je double quelques coureurs mais pourtant je vois bien que j'ai perdu en descente. Il faut dire que je n'ai fait aucune descente un peu technique depuis 5 mois, date de ma dernière compet dans les causses. C'est bien beau de faire une pause hivernale mais ça fait mal aux cuisses!

Les derniers km sont plus plats, malgré quelques coups de cul. Il faut relancer et je n'y arrive plus. Crevée la gonzesse. Deux coureurs me doublent, peu importe. Je franchis la ligne après 6h19, 10ème F, 124/588 (21%) au scratch. Mayou et Cédric sont déjà là évidemment. Pierre aussi mais lui a triché, il a fait le petit parcours! ;) Laurianne arrive une dizaine de minutes plus tard (bravo, super course!), suivi de Cyril qui aura eu un gros coup de chaud sur la fin.

Le podium de la dream team de Bélézy... en partant de la fin!
Cette 10ème place femme pourrait me décevoir pourtant je rentre du Ventoux avec la banane. D'abord j'ai passé un week-end très sympa en compagnie de potos non moins sympa. Ensuite ce trail, je l'ai adoré. Comme trail de début de saison, c'est le plus intéressant que j'ai fait, et de loin! Enfin cette 10ème place n'a aucun goût amer: le plateau était extrêmement relevé et soyons réaliste, j'aurais peut-être pu grappiller 1-2 places dans un meilleur jour mais guère plus. Je suis à ma place. Les trails de 40-50km, ce n'est pas là où je me sens le mieux, c'est encore un peu court! Ce trail aura confirmé ce que je pressentais déjà: je ne suis pas une coureuse de début de saison. J'ai du mal à gérer l'hiver où je skie plus que je ne cours, comme beaucoup sûrement, mais à la différence près que moi je le gère moins bien!

Bon mais avec tout ça, je ne suis toujours pas vraiment montée au sommet du Ventoux!!! Je crois bien qu'il va falloir que je revienne...