samedi 24 juin 2017

Lavaredo Ultra Trail 2017 - La douleur de l'abandon

Voilà les gambettes dans les Dolos pour leur deuxième participation de l'année à une course de l'UTWT. Au menu du jour le Lavaredo Ultra Trail, environ 120km et 5800m D+. Une course qu'on annonce roulante mais incroyablement belle. J'arrive en forme et motivée pour partager ce moment avec les copains du team vibram. La vue depuis Cortina en dit déjà long sur ce que l'on va prendre dans les yeux. Amitié, trail, soleil, je me dis que tout est réuni pour que je passe un bon week-end. Seulement...




La départ est donné à 23h devant un public nombreux. Bravi bravi bravi! (car comme je l'apprends pour l'occasion, "bravo" s'accorde en italien)

Cherchez Charlie! (si si je me vois). Photo: organisation.

J'ai les jambes coupées au départ mais comme toujours il faut quelque temps aux gambettes pour chauffer et quelques dizaines de minutes plus tard elles ronronnent comme un vieux diesel. Le parcours est roulant, c'est sûr, néanmoins le d+ est là et perso je fais la plupart des côtes en marchant, les mains en appui sur les genoux. Tout le monde ne s'appelle pas Caro Chaverot! ;)

Première bosse passée, j'attaque la 2ème en marchant-trottinant. Sans que je comprenne pourquoi, une petite douleur s'installe peu à peu dans la fesse gauche. Je me dis que ça va passer, ça m'arrive d'avoir de petites douleurs qui passent. Malheureusement celle-ci ne s'estompe pas au fil des km et a même plutôt tendance à augmenter. Pour l'instant c'est tout à fait supportable mais vais-je tenir 100km comme ça? Ca commence à gamberger dans la tête bien plus que dans les gambettes.

Au ravito du km33, je retrouve les vibram boys pour le ravito. Je leur dit que j'ai mal à la fesse et que je vais voir comment ça évolue. Je suis loin de devoir abandonner mais le fait que ça ne se stabilise pas m'inquiète. J'ai déjà fait la diag' en 2014 avec une douleur bien plus forte au genou (chute) mais la différence notoire est que la douleur s'était vite stabilisée. Dans la tête je n'avais pas l'impression d'empirer les choses à continuer. Aujourd'hui c'est différent.

Le soleil commence à pointer le bout de son nez dans la montée vers les tre cimes. J'éteins la nao et découvre les magnifiques falaises qui nous entourent. Ah c'est beau les Dolos! Je monte en marchant à un bon rythme. La douleur à la fesse continue d'augmenter mais c'est encore supportable en montée, même si la descente m'inquiète plus. Mais chaque chose en son temps: pour l'instant, monter!

Au refuge je retrouve Jérome, Nico et co. Je leur dit que je continue parce que maintenant que je me suis tapée toute la nuit, j'ai quand même envie de profiter un peu du jour! Mais intérieurement je suis pessimiste pour la suite. Je repars en trottinant ou plutôt en claudiquant puisque je boite depuis quelque temps pour diminuer le poids sur la jambe gauche. Maud qui était juste devant moi au refuge disparait vite, d'autres coureurs me doublent. Pas facile dans la tête mais la vue est tellement GRANDIOSE que je garde le sourire. GRANDIOSE n'est pas le mot. A vrai dire il faudrait inventer de nouveaux superlatifs. Lever du jour orangé sur les falaises grises vertigineuses des tre cimes au dessus d'une mer de nuages bleue. Sincèrement j'ai rarement vu quelque chose d'aussi beau!

Au pied des tre cimes. Photo: organisation

La piste en balcon terminée, on attaque une descente de 800m D-. Raide et un peu technique au début, puis bien plus roulante (et à vrai dire un peu ch***) par la suite. J'arrive à courir au début mais ça devient vite trop douloureux. Je cours 10m et marche 5m. A chaque pose du pied, c'est un petit coup de poignard dans la fesse. C'est une douleur bien localisée mais qui devient décidément très douloureuse. Je fais un rapide calcul, il me reste plus de 60km à continuer comme ça. Je n'ai jamais eu de plaisir à courir dans la douleur mais surtout je n'arrête pas de me répéter que c'est une connerie ce que je fais, que le fait que j'aie de plus en plus mal, c'est que les choses empirent. J'ai mal mais de toute façon ça gamberge bien trop dans la tête pour courir. C'est décidé, j'arrête. J'appelle les vibram boys pour qu'ils viennent me chercher à la prochaine route. Km60. Fin de l'aventure dolomitienne. (ça se dit?)

Bizarrement au début, cet abandon (mon 1er sur blessure), je ne le prends pas mal du tout. Sans avoir abandonné, je m'en voulais bien plus à la Transgrancaria de m'être si mal préparée. Aujourd'hui physiquement j'étais prête, je n'ai même pas chuté, pas fait d'erreur. Je me dis qu'une blessure ça arrive, c'est peut-être juste la faute à pas de chance. Mais le moral se détériore au fil de la journée, alors que je vois les sourires radieux des coureurs franchissant la ligne d'arrivée à Cortina. Le bonheur des uns ne fait pas toujours le bonheur des autres!

6j après, je pense avoir digéré. De toute façon il faut avancer, ce qui est fait est fait! Pour la petite histoire, cette douleur c'était une élongation qui est déjà pas loin d'être guérie. La reprise est imminente. :)

Je n'ai vu que la moitié du parcours mais ce que je peux en dire c'est que les paysages sont grandioses mais le tracé en lui-même est beaucoup moins enthousiasmant. Beaucoup de pistes monotones, de longues lignes droites, très peu de singles. Personnellement, une année où la météo ne permettrait pas de profiter des paysages (et c'est souvent le cas dans les Dolos!), je m'ennuierais sacrément. Ceci étant dit, il en faut pour tous les goûts et heureusement qu'il y a des courses comme ça pour ceux qui aiment envoyer.

Pour finir, merci au team vibram pour leur assistance physique et morale, leur bienveillance, leur gentillesse, leur amitié, les tranches de rigolades et les bonnes pizzas! Merci aux organisateurs, aux baliseurs, aux bénévoles. Et un grand merci aux nombreux supporters italiens présents à chaque coin de route. Bravo brava bravi! Et évidemment merci à ceux qui me soutiennent avec ou sans ligne d'arrivée: isostar, trailstore, Tente Hussarde NaïtUp.



dimanche 4 juin 2017

Transju'trail 2017 - en mode boue et TTT

Après Gruissan en février, me voilà avec la Transju'trail sur une 2ème manche du TTN en l'espace de quelques mois. C'est qu'avec les copains du TTT (et surtout son prez!!), on a décidé cette année de jouer le classement club. Indépendamment du TTN, c'est de toute façon une course qui me dit depuis quelque temps: 72km 3200+ de traversée du Jura de Mouthe aux Rousses, dans l'autre sens que la transju ski de fond que j'ai déjà faite plusieurs fois et en passant par les sommets. C'est l'occasion d'aller voir à quoi ressemblent les sentiers jurassiens l'été. Enfin l'été au sens jurassien...



La veille en fin d'après-midi il commence à pleuvoir des cordes et au réveil au matin ça n'a pas diminué. Je me dis que finalement, je n'ai peut-être pas tant envie que ça de la faire cette course! Mais c'est le trail, il faut se faire aux conditions météo. Et puis pas le choix, le prez veille aux grains!

Le départ est donné de Mouthe sous une bonne pluie bien fraiche. Je pars prudemment parce que je sais que ça va être long cette histoire mais aussi parce qu'on m'a conseillé d'arriver fraiche à Morez à mi-course, voire même à Prémanon. Je cours les premières minutes avec Delphine avant qu'elle ne décroche un peu. Il pleut mais sous les grands sapins on est relativement épargnés. Et puis au fil des kms le ciel semble s'éclaircir un peu. On passe du gris foncé au gris clair, si ça se trouve, c'est même ce qu'on appelle du beau temps dans le Jura! ;)

A la Chapelle des bois (km16), je retrouve le prez derrière l'objectif et Cyril derrière les flasques. Malgré la pluie il y a beaucoup de spectateurs. Et oh c'est pas une petite bruine (=pluie battante) qui va faire peur aux jurassiens! Inconscience ou excès d'optimisme, je décide de changer mon kway pour un coupe-vent. Bonne galère pour l'enfiler sous la pluie malgré l'aide de Cyril: la membrane colle aux bras et puis mince (pour rester polie), il est à l'envers! Je mets plusieurs minutes à me changer, tout ça en répondant en même temps aux questions du speaker. C'est la galère! Finalement ouf je repars.

Départ du ravito de la Chapelle des bois (avec Yanis). Photo: le prez

On enchaine par une montée courte mais assez sèche puis quelques km de crêtes de la roche Bernard. C'est sûrement beau, enfin j'en sais rien car aujourd'hui c'est complètement bouché. Dommage! Je continue mon petit bonhomme de chemin (boueux) et rejoins Morbier (km32). On m'a dit que c'était le seul endroit de la course où on trouvait du Morbier et croyez-moi, ce n'est pas tombée dans l'oreille d'une sourde! Donc on va dire que j'en profite bien... Désolée pour ceux qui derrière moi n'ont pas pu en avoir! ;)

A Morez (km34) je retrouve le prez derrière l'objectif et Cyril derrière les flasques. Ravito express qui cette fois se passe à la perfection. Je repars sous les encouragements du public nombreux et avec Sangé qui me fait l'honneur de m'accompagne sur les 1ers mètres. Merci mec pour les paroles sympas et plus encore pour ton sourire communicatif!

Au ravito de Morez. Photo: le prez

On enchaine par un bon raidard puis un single joueur, encore plus avec toute cette boue. Ca ressemble parfois plus à du ski-boue qu'à du running... Finalement cette transju ne me change pas vraiment de la version ski de fond!

A Prémanon (km47), Cyril et le prez ne sont pas là mais c'est normal, ce n'était pas prévu. Je fais un ravito express parce que le 23km vient de partir il y a 5' à peine et le début du parcours étant différent, j'ai toujours l'optimisme de croire que je vais pouvoir passer avant. Que nenni quelques minutes plus tard les deux courses se rejoignent et je suis en queue de peloton du 23km. Il y a des dizaines et des dizaines de coureurs autour de moi alors que jusque là j'étais presque seule. Je réalise que je vais devoir faire toute la fin de course avec le peloton du 23km et ça me zappe un peu le moral.

Mais c'est peut-être un mal pour un bien côté chrono car cela me motive pour la Grande Remontada du Peloton. Je double à gauche, à droite, au milieu, dès qu'il y a un petit trou je m'y engouffre (de manière peut-être peu cavalière parfois - désolée les coureurs). Et je remonte et je remonte et je remonte. Mais c'est pas possible, il viennent d'où tous ces gens, il y en a toujours autant!

J'arrive au ravito des Dappes (km54) où je dois retrouver Cyril. J'ai beau bien regarder, je ne le vois pas mais il faut dire qu'entre les spectateurs, les assistants et les coureurs, il y a un monde fou quand je passe. En voyant la longue queue de voitures sur la route, je me dis que Cyril doit être dans les embouteillages, il n'a pas dû pouvoir arriver à temps. Je repars sans me ravitailler en me disant qu'il sera au prochain (que l'on avait pourtant pas prévu).

Je fais la montée jusqu'à la Dôle aussi vite que je peux car il y a un challenge spécial sur cette montée et je suis joueuse! Je continue la remontada du 23 mais je n'ai pas l'impression que ce soit moins dense. C'est pas possible, il se multiplient ou quoi tous ces coureurs?! Arrivée au sommet de la Dôle (km57), je ne vois pas de tapis pour prendre le chrono. Je me dis mince, c'est peut être plus loin alors je continue aussi vite que je peux. Ca descend puis remonte jusqu'au col de Porte. Je suis toujours "à fond" (avec les guillemets - on parle des gambettes quand même!). Pétard mais il est où ce foutu tapis pour le chrono?!? Je double Mayou dans le dernier raidard, puis on bascule sur le ravito de Cuvaloup (km62).

A Cuvaloup, pas de tapis (je me dis que j'ai dû le rater) mais surtout pas de Cyril. P**** mais où il est le coquin? Je n'ai plus rien à manger, plus de powertabs à mettre dans mes flasques. En fait Cyril est ... encore en train de m'attendre au ravito précédent! Depuis 1h30 sous la pluie! Il était bien là quand je suis passée mais à cause du monde on ne s'est pas vu. Et vu que le livetrail ne marche pas il croit que je ne suis pas encore passée! Bref, c'est la loose!

Je repars du ravito avec une banane entière dans la main en espérant que cela fasse l'affaire pour les derniers 10km. Malheur, 50m après le ravito, je la fais tomber dans la boue. Je me retourne et estime que 50m pour quelqu'un qui doit en faire 72000 c'est décidément un trop gros détour et donc je continue. Erreur! je suis complètement à sec et l'hypo me guette. Je ressors les vieux emballages de gels mangés quelques heures plus tôt pour en extraire les dernières gouttes. Il y a plein de coureurs autour de moi, dont Mayou qui me redouble, mais j'estime que ce ne serait pas correct de leur demander à manger. C'est moi qui me suis emmêlée les doigts de pieds dans les ravitos, j'assume. Je guette par terre si quelqu'un n'aurait pas perdu (ou jeté...) un gel ou une barre. Même à moitié mangés et tombés dans la boue, au point où j'en suis, je prends tout! Mais malheur aux jurassiens, ils ne sont décidément pas assez sales! Ca vous perdra! ;)

Je finis tant bien que mal en jetant mes dernières forces dans la bataille, accompagnée de Mickael qui m'a rejoint après une bonne pause au ravito. Tellement contente de voir la ligne d'arrivée, je n'aurai pas pu continuer longtemps comme ça! Au final 8h04, 1ère femme, (32/390 scratch, 8%). Un chrono que je n'espérais pas aussi bas!

La tape avec Mayou à l'arrivée. Photo: Nordic magazine

Merci au TTT pour ce week-end d'enfer comme toujours! Avec un énorme chrono pour tous (5 dans les 33 premiers!). Bravo les copains! On attend le classement équipe mais ça sent bon! ;) Merci au prez de nous obliger euh nous encourager à vivre des émotions comme ça! ;) Merci aux organisateurs, aux baliseurs, aux bénévoles. Et un grand merci aux jurassiens pour leur présence à chaque coin de sentier malgré la météo. Et évidemment merci à ceux qui me soutiennent sous le soleil comme dans la boue: vibram, isostar, trailstore, Tente Hussarde NaïtUp.

Prochain épisode dans les Dolos sur le Lavaredo Ultra Trail avec les copains du team vibram!